RETOUR
D’UNE EXPÉRIENCE DE THÉÂTRE DANS LE METAVERS
Jacqueline
et Jean-Claude Barral du Théâtre de l'Adret, initiateurs français
du Théâtre-Promenade dans la nature et sur des sites culturels,
reviennent sur leur expérience de Théâtre-Promenade dans un
territoire numérique immersif modélisé par Jenny Bihouise.
i3Dim :
Pour
les profanes, pouvez-vous préciser d'abord en quelques mots en quoi
a consisté cette première francophone de Théâtre-Promenade sur le
web ?
Théâtre
de l'Adret :
La technologie que nous avons utilisée [opensimulator] est en accès
libre et gratuit. Elle nous a permis de connecter des personnes avec
des comédiens, pour vivre en direct un spectacle scénarisé en
immersion 3D. Pour nous cela privilégie l’émotion et met à
disposition des moyens inédits pour valoriser des lieux moteurs de
l’action. Tour à tour spectateurs et acteurs, en fait tous les
participants s’approprient l’espace, les lieux deviennent
familiers, les relations se nouent… Cette forme de
Théâtre-Promenade en ligne tisse des liens et constitue une
rencontre peu ordinaire avec les comédiens, mais pas seulement. Nous
pensons aussi qu'il s'agit là d'une forme nouvelle de médiation
culturelle dont beaucoup d’acteurs économiques pourraient tirer
parti.
i3Dim :
Pensez-vous que cela pourrait aussi être une nouvelle forme de
spectacle ?
L'Adret :
Oui. Lorsque nous avons rencontré virtuellement il y a quatre mois
Jenny Bihouise pour lancer cette expérimentation sur la plate-forme
EVER de l’Université de Strasbourg, nous n’imaginions pas le
moins du monde le changement qui s’en suivrait dans notre pratique
théâtrale. Mais en étant progressivement amenés à passer de la
mise en scène à la scénarisation nous avons réalisé le potentiel
de tels espaces numériques.
I3Dim :
Comment cela s'est-il passé ?
L'Adret :
Tout d’abord nous avons fait un premier constat : l’écrit
décomposé en dialogues fonctionne mieux que certains textes de
théâtre, tout simplement parce que le jeu du comédien ne peut,
dans ce type d'environnement virtuel, trouver d’appui ni dans le
regard ni dans le geste.
I3Dim :
C'est la même problématique que pour une pièce radiophonique,
non ?
L'Adret :
Non, pas vraiment, car les personnages ici se déplacent dans un
décor, tout comme au théâtre. De surcroît, les spectateurs
doivent aussi être en mouvement. La mise en scène consiste donc,
dans un premier temps, à rendre le spectateur acteur. Le décorateur,
en l’occurrence Jenny Bihouise, devient magicien. Son rôle est
primordial car la scénarisation 3D ouvre véritablement des
perspectives infinies et porte les textes dans l’imaginaire.
I3Dim :
Comme pour toute scénographie, les comédiens doivent s’approprier
l’environnement. Mais qu’en est-il du jeu des acteurs dans ce
contexte ?
L'Adret :
La
voix est prépondérante et le rythme pas facile à trouver. La
manipulation du personnage est délicate au début. Nous n'avons
aucune possibilité d’entendre ce que le public perçoit. Notre
miroir en répétition, ce sont alors les personnes connectées, et
non plus le metteur en scène. Mais la confiance dans l’équipe en
est renforcée. Nous avions opté en plus pour le choix d'un seul
avatar pour deux comédiens. La sensation des déplacements qui
soutiennent le jeu existe bien, mais elle appartient à celui qui
manipule et non à celui qui dit. Donc pas franchement
marionnettistes les comédiens !
I3Dim :
Qu'est-ce qui vous a le plus déstabilisés ?
L'Adret :
Au
début le fait de ne pas pouvoir nous appuyer sur des gestes, des
regards pour indiquer une intention… Il y a seulement un
déplacement dans l’espace, la possibilité de s’asseoir ou de se
lever et aussi, certes, de voler !
I3Dim :
Frustrés ?
L'Adret :
Au
départ, le rapport avec le public est frustrant, car il n'y a pour
les comédiens aucun retour direct, aucune vibration, aucune
perception de ce silence palpitant qui font habituellement entrer en
communion comédiens et spectateurs. Mais assez rapidement nous
apprenons à détecter les réactions, car cette forme de spectacle
suscite aussi de l’émotion. Tchats vifs et enjoués, absence de
tchats à la lecture d’un passage poignant, flânerie ou mise en
mouvement rapide… deviennent de nouveaux repères. Nous vibrons,
emportés par le texte, et sentons les spectateurs réagir à
l’identique aux temps forts de la scénographie. Puis le spectacle
s’achève et le dialogue s’installe. Nous aimerions qu’il
continue par mails avec nous, avec l’auteur, avec l’équipe…
Nous avons revécu la même sensation de plénitude qui disparaît
quand le rideau tombe.
Des
internautes-spectateurs de France, d'Israël et des États-Unis…
unis pour participer ce soir-là à une visite théâtralisée des
bords de la Saône...
|
Plus d'infos en suivant ce lien "Théâtre de l'Adret - Lectures scénarisées"...
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire